Les économies des pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée ont été fortement affectées par la crise internationale et par les révolutions arabes. Les taux d’emplois formels y sont parmi les plus bas au monde (40 %), et les jeunes, qui arrivent en masse sur le marché du travail, sont les premières victimes du chômage. Quelles solutions pour créer de l’emploi dans les pays de la zone ?
Favoriser une meilleure adéquation entre formations et besoins des entreprises
L’offre et la demande d’emplois en zone Méditerranée ne concordent pas. Par exemple, « deux tiers des lauréats de l’enseignement supérieur au Maroc sortent formés dans des disciplines qui ne sont pas au cœur des préoccupations des entreprises » (M. Soual). Les entreprises sont donc souvent contraintes de former elles-mêmes leurs salariés. Et de leur côté, les jeunes diplômés peinent à trouver un emploi. Ils « n’ont le choix qu’entre un déclassement local (en se tournant vers des emplois sous-qualifiés dans le secteur public) et l’expatriation forcée » (E. M. Mouhoud). Dans la zone, le brain drain est deux à trois fois supérieur à la moyenne des pays intermédiaires. Les formations devraient donc être mises en adéquation avec les besoins du marché et organisées autour de l’insertion professionnelle des jeunes diplômés.
Diversifier la production en misant sur des secteurs innovants et à forte valeur ajoutée
En lien avec le point précédent, la spécialisation productive actuelle des pays de la Méditerranée n’est avantageuse pour créer de l’emploi. Principale cliente des pays méditerranéens, l’Union européenne a favorisé leur spécialisation sur des secteurs peu productifs et des biens à faible valeur ajoutée, ce qui n’est pas favorable à la création d’emplois, notamment qualifié. Or, « les transferts de main-d’œuvre d’un secteur peu productif (comme le secteur agricole) vers des secteurs productifs (secteurs de l’industrie et des services) permettent de réaliser des gains de productivité. » (N. Madriaga). Ces gains de productivité sont sources d’emploi s’ils sont fondés sur des activités innovantes plutôt que sur une rationalisation du processus de production économisant de la main d’œuvre. Les pays de la zone Méditerranée devraient donc diversifier leur production, pour le moment trop polarisée, en se spécialisant dans des secteurs innovants ou à forte valeur ajoutée, pourquoi pas dans l’aéronautique et l’automobile, comme au Maroc, ou encore dans les NTIC qui sont susceptibles d’offrir des emplois qualifiés aux jeunes diplômés.
Jouer collectif pour conquérir de nouveaux marchés
Les fournisseurs de l’Europe sont aujourd’hui impactés par son ralentissement économique. Les pays de la zone Méditerranéenne doivent donc trouver des solutions pour mener des négociations commerciales plus favorables avec leurs partenaires commerciaux européens, et pour s’ouvrir vers de nouveaux marchés. Cela passe par un rapprochement, un dialogue et une entente entre les pays de la zone. Ils devront rompre avec leurs habitudes « d’intégration individuelle et spécifique » jusqu’ici pratiquées par chaque pays avec l’UE. Et ils devront trouver des « complémentarités sectorielles » pour « défendre la compétitivité de la zone Méditerranée à l’international » (M. Chafiki). Ils pourront ainsi conquérir de nouveaux marchés, en particulier dans le Sud de l’Afrique.
Réformer le foncier et l’immobilier pour une plus grande équité dans l’accès à l’emploi
« Les pays de la Méditerranée sont caractérisés par une forte décomposition territoriale » (E. M. Mouhoud). La croissance et l’emploi sont concentrés géographiquement autour des grandes métropoles. Or, les prix de l’immobilier sont prohibitifs pour une partie de la population qui n’a donc pas accès aux principaux bassins d’emploi. En outre, les législations fiscales favorisent les investissements dans l’immobilier au détriment d’autres secteurs qui pourraient être de plus importants pourvoyeurs d’emplois.
Soutenir les PME, premiers pourvoyeurs d’emplois
Les PME « sont confrontées à de lourdes contraintes qui entravent leur développement » (H. Ghanem), notamment au plan fiscal et administratif. En outre, le poids de la corruption et le fait que certains secteurs de l’économie sont captifs des pouvoirs politiques n’encouragent pas l’investissement. En conséquence, une grande majorité des PME demeure dans le secteur informel (près de 80 % en Égypte). La lutte contre la corruption, l’allégement des contraintes administratives et fiscales, et le lancement d’initiatives encourageant l’investissement dans les PME seraient des moyens de renforcer ces acteurs, premiers pourvoyeurs d’emplois en zone Méditerranée.