
Faisant l’objet de nombreuses applications dans des domaines au cœur des préoccupations des pays du Sud, les satellites d’observation de la Terre peuvent être de véritables outils au service du développement. La promotion de ces technologies doit passer par une intensification des efforts de communication sur leurs bénéfices, des formations auprès des non-spécialistes mais aussi par l’élaboration d’un modèle économique durable afin de garantir une utilisation pérenne.
Utiliser les satellites pour mieux répondre à des enjeux de développement
« L’espace est un élément clé pour comprendre, surveiller et prévoir l’état de notre planète » (Aurélie Sand). Les applications des satellites sont possibles dans un grand nombre de domaines cruciaux pour les pays en développement : environnement, biodiversité, urbanisme, santé, ressources naturelles … Par exemple, la télé-épidémiologie fournit aux acteurs de la santé publique « des outils et des services adaptés à leurs besoins qui vont leur permettre de surveiller et de prévoir les épidémies, afin de leur permettre de bâtir au mieux ou d’adapter au mieux leurs stratégies d’adaptation face aux risques prédits » (Cécile Vignolles). En Indonésie, pays constitué de plus de 17 000 îles, le satellite est parfaitement adapté car il est impossible de surveiller le domaine maritime en bateau (Antoine Monsaingeon). Avoir une cartographie fine des territoires en Afrique, confrontée à une urbanisation galopante, peut aider à la mise en place de politiques cadastrales (Laurent Durieux) « Il s’agit d’observer pour informer et d’informer pour décider et ensuite pour agir » (Aurélie Sand). Cependant, « l’essentiel, c’est bien la politique (…).Nous ne pouvons rien faire s’il n’y a pas d’abord une volonté politique d’un gouvernement de gérer ses ressources naturelles, de gérer son développement, de gérer son territoire. (…) C’est ensuite seulement qu’on peut penser au satellite » (Jean-Luc François).
Continuer à informer des bénéfices de ces technologies
« Il faut sans arrêt convaincre, convaincre, convaincre les utilisateurs de l’intérêt d’utiliser les images du spatial » (Joël Tignon). En effet, « dans l’ensemble, les interlocuteurs que l’AFD rencontre dans un pays (ministère des Finances, de l’Agriculture, des Pêches…) ne sont pas encore convaincus qu’un petit investissement dans ce secteur va être extrêmement rentable » (Jean-Luc François). Il faut intensifier les efforts de communication sur le potentiel de ces données, notamment auprès des acteurs qui ne connaissent pas la donnée satellite mais auxquels elle peut être utile dans leurs domaines d’activité (Aurélie Sand).
Former les non-spécialistes
« Un des freins essentiels aujourd’hui (…) est la difficulté de savoir ce que l’on peut faire avec. (…) Il y a un clair déficit de formations à l’université pour former les géographes, les aménageurs, les géomaticiens… dans l’utilisation des données spatiales » (Joël Tignon). La promotion de ces technologies doit donc être accompagnée de transferts d’expertises et de formations.
Inventer un modèle économique durable
Le secteur privé a un rôle à jouer dans le transfert de technologies du Nord vers le Sud (Christophe Sannier). D’ailleurs, « les quelques exemples de réussites que nous avons vus dans le domaine marchand viennent de pays qui ont réussi à coupler l’action publique avec le secteur privé. Je pense à l’Afrique du Sud, par exemple, qui est partie d’une approche 100% publique et qui a eu une politique d’essaimage : ont ainsi été créées des petites PME spécialisées dans l’agriculture, l’environnement, l’inventaire des populations… » (Didier Rigal). L’enjeu pour les différents acteurs concernés (particulièrement les Etats, les industriels et les centres de recherche) est donc d’élaborer un modèle économique qui permet à ces projets d’être à terme autonome financièrement.
Bien analyser les besoins et capacités des pays
Promouvoir les satellites est un « défi parce que l’on est dans la confrontation de hautes technologies et de pays qui ont peu de moyens technologiques, d’investissements qui sont chers et de pays qui n’ont pas beaucoup d’argent, de sujets qui sont souvent régionaux, alors que les investissements sont souvent nationaux » (Jacques Moineville). Il faut donc bien apprécier l’opportunité d’investissement : « peut-être qu’en Afrique on a d’autres façons d’avoir le service pour moins cher ?» (Jean-Luc François). « Au final, ce qui est important, c’est de rechercher l’adéquation au projet et aux besoins locaux » (Joël Tignon).
Sont intervenus (avec en lien les présentations utilisées lors de la conférence) :
- Alexis Bonnel, conseiller Développement Durable à la direction des Opérations de l’AFD,
- Bernard Dreyfus, directeur général délégué à la Science à l’IRD
- Laurent Durieux, chef de projet GEODEV à l’IRD
- Jean-Luc François, responsable de la division Agriculture, Développement rural, Biodiversité de l’AFD
- Jérôme Frignet, chargé de campagne forêts de GreenPeace
- Alain Killmayer, directeur de GEOSYS data
- Camille Lelong, chargée de recherches au CIRAD
- Jacques Moineville, directeur général adjoint de l’AFD
- Antoine Monsaingeon, directeur général adjoint de CLS
- Mildred Montabord, chargée de projet au SERTIT de l’Université de Strasbourg
- Camille Pinet, chef de projets à IGN France International
- Serge Riazanoff, directeur de VisioTerra
- Didier Rigal, conseiller développement durable à Astrium Geo-Information Services
- Aurélie Sand, responsable thématique espace & développement au CNES
- Christophe Sannier, responsable recherche et développement de SIRS
- Joël Tignon, chef du service Information géographique et Analyse spatiale du Conseil Régional du Nord-Pas de Calais
- Pascale Ultré-Guérard, responsable du programme d’observation de la Terre au CNES
- Cécile Vignolles, responsable de projets au CNES